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À toi, mon Algérie

Cela fait 58 ans que tu es indépendante… 58 ans que tu essaies de t’en sortir mais que certains ne t’ont pas forcément laissée te relever. Aujourd’hui, je t’écris pour te dire à quel point je suis fière que mes racines aient poussé en toi. Je t’écris pour te dire que je t’aime, pour toujours. 

Le 5 juillet 1962, à 16h, flotte le drapeau algérien en face du monument qui commémore l’entrée des troupes françaises en ton sein. En 1830, soit 132 ans plus tôt, ton mariage forcé était proclamé. Une union ? Que dis-je, des violences en réunion. Des meurtres, des humiliations, des viols, des vols et une infinité de blessures psychologiques. Ô mon Algérie, comme tu as souffert… Je t’écris aujourd’hui pour te souhaiter une joyeuse fête. Certes le contexte dans lequel je rédige cette missive n’est pas joyeux. Le COVID fait rage et les gens meurent, cette fois-ci, à cause d’une pandémie. On me murmure que tu en as tristement l’habitude car oui, tu en as perdu des enfants, prêts à tout pour libérer leur mère du joug colonial. Tu en as pleuré d’autres mais, cette fois-ci, tués par leurs propres frères… leurs propres frères ! Ô mon Algérie, comme tu as souffert… 

je ne suis pas née de ton côté de la Méditerranée

Il y a plus d’un an ton peuple est sorti dans les rues, encore une fois, pour toi, pour te sauver. Car, oui, mon Algérie nous te croyions perdue depuis des années et nous étions comme anesthésiés. Chacun de notre côté, nous nous offusquions mais nous n’agissions pas assez ou du moins seulement à notre petite échelle. L’union fait la force et nous te l’avons prouvé. Nous t’avons prouvé encore une fois que quoiqu’il advienne, nous, tes enfants étions là pour toi car jamais un enfant n’abandonne sa mère patrie. Tu peux trouver ça ironique venant de ma part puisque je ne suis pas née de ton côté de la Méditerranée. Tu ne m’as vue grandir que par intermittence mais mon amour pour toi ne s’explique pas et n’a pas de limite. Tu ne m’as pas vue naître, tu ne m’as pas élevée et pourtant je me languis de toi dès que je te quitte. Enfin, je ne te quitte jamais vraiment puisqu’une partie de mon coeur t’appartient. Je n’ai pas appris à t’aimer, c’était inné. Dès notre première rencontre, tu m’as adoptée, tu m’as cajolée et tu as partagé avec moi certains de mes plus beaux souvenirs. Par contre, tu as vu grandir maman, mes grands-parents, mes oncles, mes tantes, mes cousines et cousins. 

On a souffert

Quand j’ai demandé à Yema, c’est comme ça que j’appelle ma mamie, comment c’était de grandir chez toi, pendant la guerre, ses yeux se sont embués. « C’était dur. On a souffert, beaucoup souffert. Certains ont connu la famine, la maladie avec le typhus, la mort, le deuil et à plus grande échelle la misère. À tel point que les gens déchiraient des couvertures pour s’habiller, mangeaient les épluchures de petits pois et faisaient griller les noyaux des dattes pour en faire du café… » Mon Algérie, ton peuple a connu la terreur… La peur de voir un membre de sa famille torturé et/ ou assassiné. Yema me raconte « En 1960, mes enfants étaient très malades, on est allés en voiture chez le médecin, on était au niveau des montagnes de Souk-Ahras, et des militaires sont sortis de nulle part. Ils ont descendu mon mari de la voiture et voulaient l’emmener avec eux. J’ai dû sortir avec mes jumeaux en bas âge et leur montrer qu’ils étaient très malades et que je ne pouvais pas aller à l’hôpital sans mon mari. C’est comme ça qu’ils ont accepté de nous laisser partir. »  Alors moi, je n’ai rien connu de tout ça. Je n’ai pas connu la guerre, je n’ai pas connu la terreur et j’espère ne jamais avoir à le faire. Je t’ai connue plus tard, quand tu allais mieux ou du moins en apparence. J’ai connu l’excitation à l’idée de te revoir et la peine à l’idée de te dire au revoir. J’ai découvert plus tard la beauté de tes paysages, parfois si différents de ceux que mes yeux connaissaient.

D’ici et de là-bas

Plus je grandis, plus je me pose des questions sur mon identité. Qui suis-je ? Mon père est franco-algérien, ma mère est algérienne. Je suis née en France, j’y ai grandi et pourtant, je t’aime aussi, comme si l’on ne s’était jamais séparées, comme si j’avais toujours été avec toi. Je ressens un puissant sentiment d’appartenance et jamais je ne me sens étrangère. Jamais tu ne me fais ressentir que je ne suis pas chez moi. Pourtant, on m’a souvent demandé  » Tu préfères ici ou là-bas ? » Et je n’ai jamais su et encore moins voulu y répondre parce que je suis chez moi, ici, à Paris, mais aussi chez toi, là-bas. Ô mon Algérie, ces quelques mots ne suffiront pas à te dire à quel point je t’aime… Je t’écris pour la première fois, alors je m’emmêle les pinceaux mais en ce jour si spécial, je souhaitais parler de tes maux avec mes mots.

Journaliste et fondatrice de thedaybriefing.com

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