Festival ARTSCHIVES : Rencontre avec la photographe Imene Benmansour
« Imène Benmansour est une photographe autodidacte basée à Paris. Elle met en avant portraits et villes, d’ici et d’ailleurs, en utilisant la photographie argentique comme médium et processus artistique. Imène s’empare de moments de vie qu’elle dépeint de manière authentique. Elle contrebalance portraits et photographie de rue tout en mettant l’expression personnelle et l’émotion au centre de son travail ». C’est ainsi que la jeune photographe dont je vais vous parler aujourd’hui est présentée dans le cadre du Festival Artschives qui se tient aujourd’hui, samedi 27 mai et demain, dimanche 28 mai. On l’a retrouvée dans Paris pour discuter avec elle de son rapport à la photo de l’importance de sa participation à ce festival dont le thème pour cette édition 2023 est sous le signe des « Appartenances ».
Qui es-tu chère Imène Benmansour ?
Une Algérienne de 24 ans (rires). Je plaisante mais j’ai envie de me focaliser sur la photographie aujourd’hui et moins parler de moi. Je fais de la photo depuis que j’ai 12 ans et disons que j’ai commencé avec mes parents. J’ai eu la chance de beaucoup voyagé et en 2011, on est partis au Maroc. On avait emporté l’appareil photo familial et à chaque fois, ce sont les paysages et leur perspectives qui attiraient mon regard. Je demandais alors l’appareil photo à mon père pour immortaliser ces moments et il était bien content que je m’en charge.
Comment s’est développée cette passion pour la photographie ?
En 2012/2013, j’avais trouvé un Olympus chez moi qui appartenait à ma mère, un appareil photo argentique que ma tante lui avait rapporté des Etats-Unis et offert en guise de cadeau de mariage. À l’époque, ma maman aimait aussi beaucoup la photographie et elle aurait aimé en faire mais elle était jeune, c’était à Batna (dans les Aurès, à l’est de l’Algérie), et les ateliers étaient loin et avaient lieu le soir, donc elle ne pouvait pas y aller. Du coup, pour en revenir à mon premier contact avec son appareil, j’ai acheté une pellicule et je me souviens être sortie avec mon père dans Paris pour tester. Après ça, je n’ai plus arrêté et j’ai d’ailleurs toujours avec moi cet Olympus.
Tes parents ont donc joué un rôle important dans ton plaisir à prendre des photos. Peux-tu nous en dire plus ?
Mes parents m’encourageaient beaucoup, ils me disaient que ce que je faisais était génial et puis ça les arrangeait que je sois celle qui se charge de réaliser les photos de famille. Pour eux, c’était très important de « garder en mémoire » et ils ont toujours insisté sur la qualité de l’appareil photo même si on a grandi dans des conditions modestes. Ils ont toujours voulu mettre le prix pour quelque chose qui durera dans le long terme et c’était le cas de l’appareil photo familial pour garder une trace de notre vécu.
Garder une trace de notre vécu. Se souvenir. Qu’est-ce qui a marqué et/ ou marque encore ta pratique de la photo ?
Je pense que c’est le fait d’avoir commencé jeune. Quand j’étais au collège, je n’avais pas encore de téléphone qui faisait des photos de qualité et c’est pour ça que mon rapport à mon appareil est différent de celui que j’ai avec mon iPhone aujourd’hui, qui prend lui aussi de belles photos mais autrement. J’ai une autre approche parce que j’ai commencé avec un appareil et non un telephone mais attention, je ne critique pas ceux qui se servent de leurs iPhone et autres, j’admire même le travail de certains.
Comment caractériserais-tu ta photographie ?
J’ai commencé par de la photo en voyage et de la photo de rue et jusqu’à aujourd’hui, c’est ce qui continue de caractériser ma photographie. Je pense également que le fait d’avoir débuté avec un appareil photo me permet de donner une autre valeur à la photo même si le plus important à mes yeux est de me demander ‘Pourquoi je prends cette photo ?’, ‘Quelle valeur je vais lui donner ?’. Je ne vais pas prendre une photo sur laquelle je ne vais pas revenir, je trouve que ça n’a aucun sens d’accumuler. Ça peut sembler paradoxal mais parfois je ne réfléchis pas forcément quand je prends une photo. Je regarde ce qu’il y a autour de moi et je prends la photo de ce qui attire mon oeil. A posteriori, je me suis rendue compte qu’il y a des similarités entre mes photos.
Avec nos téléphones, on a tendance à faire des photos qui restent dans notre album numérique sans jamais les imprimer. Qu’est-ce qui fait que tu vas choisir d’imprimer une photo ou non ?
Je n’imprime pas toutes mes photos. J’approche ma centième pellicule et tu te doutes bien que je n’ai pas tout imprimé. Ce qui fait que j’ai envie de les avoir sous format papier, c’est que soit ce sont des portraits, soit la photo a un sens pour moi ou pour une personne. En général, quand j’imprime c’est pour offrir. Imprimer pour imprimer, je ne vois pas non plus l’intérêt.
Peux-tu me parler de ta participation à l’évènement ‘Artschives’, dont le thème pour cette édition est « Appartenances » ?
J’ai rencontré Hajar, qui a lancé le festival Artschives, via Dune, le magazine que je dirige. On travaille sur un projet avec elle et en parallèle, je m’étais rendue à la première édition de son événement l’année dernière. On a beaucoup discuté et je lui avais dit en plaisantant ‘Pour la prochaine édition, tu me tiens au courant’ et… elle l’a vraiment fait (rires). Mon entourage m’a poussée à donner suite à cette proposition, dont Leïla Cab, elle aussi photographe, mais aussi toi et d’autres amis. Je n’aime pas forcément partager mon travail habituellement… Partager sur Instagram, pourquoi pas ? Mais je voulais plus que ça et avoir un réel contact avec les personnes qui regarderaient mes photos. Le thème ‘Appartenances’ fait écho à beaucoup de choses… Qui sont ces diasporas ? Où est-ce qu’elles vivent ? À quoi elles ressemblent ?
Quel est le thème de ton exposition ?
J’ai réfléchi à mon exposition en ayant déjà le thème Appartenances en tête. J’ai décidé de la centrer sur la célébration, qu’elle soit en intimité et en communauté. J’ai choisi des photos de rue lors de mes voyages. Il y a beaucoup de personnes qui vont être un peu perdues avec ce thème parce qu’elles se posent des questions sur leur identité, leur culture, parfois double, voire triple. On entend souvent des ‘J’ai le cul entre deux chaises’, ‘Je suis ni d’ici, ni de là-bas’… Ma première impulsion avec cette exposition, c’était de dire il faut aller outre ça et parler concrètement. La question primordiale selon moi, c’est ‘Qu’est-ce que tu vas faire de tes appartenances ?’. Je suis donc arrivée très rapidement sur le thème ‘célébrer’. Une des choses qui prend beaucoup de place dans ma vie, c’est la musique mais aussi la spiritualité et ma foi. ‘Célébrer’ pour moi, c’était donc une évidence. Je voulais parler de célébrations en différentes dimensions… Se célébrer, en tant que personne, en communauté, célébrer un mariage…
Le terme ‘diaspora’ est souvent employé aujourd’hui pour parler des descendant.es d’immigrés mais que signifie-t-il vraiment ? De quoi parle-t-on quand on évoque le ‘sentiment d’appartenance’ ?, questionnent les fondatrices du Festival Artschives. Pour le savoir ?
Rendez-vous les samedi 27 & dimanche 28 mai à partir de 14h jusqu’à 23h à la Maison de la Conversation au 12, rue Maurice Grimaud dans le XVIIIe arrondissement de Paris.
Amel
Superbe interview ! On ressent une sincère passion pour la photographie, presqu’une personnalisation de l’appreil photo et de sa fonction. Cheers to more exhibitions!
thedaybriefing
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